ADALBERTO ROQUE / AFP

MANIFESTATION FANTÔME DU 15 NOVEMBRE : LUMIÈRE SUR LE GOUVERNEMENT CUBAIN

Appelés à manifester contre le régime cubain le 15 novembre 2021, les habitants et habitantes de l’Île ont assisté avec impuissance au bal des militaires rendant impossible toute forme de manifestation, et mettant en lumière les pratiques dictatoriales du régime castriste.

L’opposition au régime cubain n’en finit plus d’enfler. Depuis trois ans, la dictature castriste est en proie à des mouvements de contestation historiques. Si en 2018, seuls les artistes cubains s’étaient exprimés contre le régime, les manifestations du 11 juillet et du 15 novembre 2021 ont su toucher une plus grande frange de la population, associant artistes et citoyens lambdas dans une même lutte. Convoquée par le dramaturge Yunior Garcia depuis la plateforme internet « Archipiélago », la « marche pour le changement » du 15 novembre n’a pu se tenir, laissant place à un défilé de policiers bien décidés à taire les critiques contre le régime dictatorial.

Des manifestations avortées

Le dramaturge cubain Yunior Garcia avait lancé un appel à manifester le 15 novembre 2021 depuis la plateforme « Archipiélago » pour exiger la libération de tous les prisonniers politiques, la fin des violences, le respect des droits des cubains et cubaines et la résolution des différents par les voies de la démocratie et du pacifisme. Le gouvernement a vite réagi. Interdisant la manifestation,  il a de plus, sous prétexte de célébration du 502e anniversaire de la fondation de la Havane, déployé les forces de l’ordre dans la capitale. Les tentatives d’intimidation, menaces, répressions et autres procédés caractéristiques des régimes autoritaires, ont poussé le leader de l’opposition à demander aux citoyens de ne pas suivre le parcours initialement prévu. Il a plutôt décidé de défiler seul et a convié les militants à sortir de chez eux vêtus de blanc, et arpenter la ville de manière décousue. Les plus frileux pouvaient accrocher un drap blanc à leur fenêtre. Seulement, tout ne s’est pas passé comme prévu. Les policiers se sont postés au bas des logements des principaux dissidents pour les empêcher de sortir, et au niveau des places et avenues principales, écrasant ainsi toute forme possible de critique contre le mouvement national de la « Revolución ».

Yunior Garcia retenu de force chez lui le 15 novembre

Crédit : STR/AFP

Aux origines du 15 novembre : les manifestations du 27 novembre et du 11 juillet

En 2018, on avait pu assister à la formation du mouvement « San Isidro » composé de 300 jeunes artistes. En réaction au décret 349, ces artistes s’étaient rassemblés le 27 novembre 2018 devant le Ministère de la Culture. Ce décret les restreignait considérablement dans leur art, voire les en privait, leur imposant de demander l’autorisation au gouvernement pour se produire sur scène ou vendre leurs oeuvres. Par la suite, les artistes ont continué à être la cible des attaques du gouvernement jusqu’à l’incarcération de tous les participants à la chanson Patria o vida, dont le titre détournait la devise castriste « Patria o muerte » (la Patrie ou la mort). S’il a déplu au régime, ce morceau, offert par les rappeurs El Funky et Maykel Osorbo en février 2021, a connu un succès fulgurant sur les réseaux sociaux devenant à cette occasion l’hymne de l’opposition. 

D’autre part, c’est dans un contexte de pénurie alimentaire et de crise sanitaire face au Covid-19 que se sont cristallisées les manifestations historiques du 11 juillet 2021. D’une ampleur sans précédent, ce mouvement contestataire a su associer artistes et citoyens lambdas dans une même lutte pour la démocratie.

Tortures, menaces, et mensonges : les réponses du gouvernement

Lors de ces trois vagues contestataires, le pouvoir cubain s’est employé à affaiblir l’opposition aux moyens dignes d’un gouvernement autoritaire et dictatorial. Plus de 1000 individus ont été arrêtés sans aucun motif lors des manifestations du 11 juillet, dont 500 sont encore en prison, selon l’ONG Human Rights Watch. Cette même organisation a recensé en détail les violences commises à l’encontre de 130 victimes. Le témoignage glaçant de María Cristina Garrido, 39 ans, relate l’humiliation et la torture qu’elle a subi. Privée d’eau et de sommeil, elle était frappée aux jambes et aux bras, forcée de crier « ¡ Viva Fidel ! », « ¡ Viva la Revolución » (Vive Fidel ! Vive la Révolution !) sous peine de rejoindre une cellule plongée dans le noir.

À l’occasion du 15 novembre, le gouvernement cubain ne s’est rien interdit. Menaces sur les dissidents, confinement forcé et arrestations arbitraires se sont ajoutées à l’accusation infondée du gouvernement contre les Etats-Unis. Ils ont été désignés coupables de l’organisation de la manifestation dans une tentative de coup d’état contre le régime castriste. C’est par cette dernière accusation que le gouvernement a justifié son interdiction de la manifestation.

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